*** Seul le prononcé fait foi / Check against delivery ***
Madame la Commissaire, Chère Vera, Mesdames et Messieurs, Chers collègues,
C’est avec grand plaisir que je m’adresse à vous aujourd’hui en tant que Présidente sortante de la Conférence Internationale, et ouvre au côté de Vera Jourova cette deuxième journée de discussion de la session ouverte.
« Towards a Digital Ethics » – vers une éthique du numérique – voilà le thème qui sera le fil conducteur de nos échanges ce matin. Ce sujet fait bien évidemment échos aux grands débats actuels sur le développement numérique et son impact sur nos sociétés, sur ces nouvelles technologies qui fondent l’écosystème de la donnée que nous connaissons aujourd’hui.
Nous sommes réunis aujourd’hui dans un contexte assez particulier, face à des enjeux émergents ou persistants. Car comme l’a dit Tim Cook hier, « the crisis is real». La révolution numérique est une opportunité formidable, mais elle s’accompagne aussi de craintes, d’externalités négatives sur nos économies, nos sociétés et même nos modes vie.
Cette crise immédiate est celle d’un sentiment de perte de maitrise en matière de données personnelles mais aussi plus généralement du constat que ces technologies sont en train de « dérober le tissu » ou la fabrication de nos sociétés comme a pu le dire hier Tristan Harris. Cette « data crisis » n’est donc pas seulement une crise de confiance en matière d’utilisation des données personnelles. C’est le sentiment qu’une société numérique tout entière se construit sans nous : que cette société numérique opère des choix en matière de libertés, d’organisations, de vision politique, et que nous ne sommes plus maitres de ces choix.
Dans ce contexte, le questionnement éthique est légitime, et il ne se limite pas à notre seule assemblée, soyons-en conscients.
Le questionnement éthique est celui du sens que nous voulons donner à notre monde. Il porte aussi sur la méthode pour construire ce sens.
Si nous ne répondons pas à ces deux questionnements, si nous n’agissons pas via des décisions concrètes et effectives, nous ne pourrons pas collectivement garder la main sur notre avenir. Et il y a urgence et une forte attente de nos concitoyens sur le sujet. Mais ne nous enfermons pas dans un concept d’éthique trop théorique qui deviendrait finalement le vernis de notre inaction ou impuissance. Agissons!
A cet égard, la session fermée de la conférence internationale qui a rassemblé lundi et mardi de cette semaine plus de 75 autorités venues du monde entier a pris ses responsabilités et a souhaité faire entendre une voix forte dans ce chantier complexe et progressif de la construction d’une « certaine vision » de la société numérique.
Elle a d’abord mis en place un groupe permanent de contact avec la société civile. Cette dernière est une nouvelle puissance du numérique, aux côtés des entreprises et des acteurs publics. Elle devient un véritable relais dans les opinions, voire même une force de pression. Il n’est plus possible aujourd’hui de l’oublier; et la voix de cette société civile manque encore bien souvent à nos processus décisionnels. La conférence mondiale a souhaité créer ce lien permanent et cette décision illustre s’inscrit clairement dans une approche éthique de la société numérique.
Pourquoi ? Car l’éthique ne pourra pas être un principe directeur, ni même un standard commun, tant qu’elle ne sera pas le reflet d’un contrat collectif – pas seulement entre nous, régulateurs, mais entres les différentes partie prenantes qui font notre société. L’éthique, c’est construire un espace commun de dialogue et prendre des décisions sur la base de cette délibération commune. La conférence mondiale veut aller en ce sens.
Plus généralement, la Conférence Internationale des Commissaires à la Vie Privée et à la Protection des Données (ICDPPC), a décidé de se fixer un nouvel horizon, dépassant la seule organisation d’une conférence annuelle. Les autorités membres ont adopté une feuille de route pour l’avenir de la Conférence Internationale, avec pour objectif de progressivement transformer celle-ci en une organisation permanente, plus visible, plus opérationnelle pour ses membres. Cela peut paraitre à certains comme de la cuisine interne ! mais ce n’est pas une simple amélioration de nos modes de fonctionnement. Ce qui est enclenché, c’est le mouvement vers l’établissement d’une véritable organisation internationale de la protection des données et de la vie privée, qui pourra porter notre vision dans les grands débats mondiaux qui s’engagent. C’est un fait majeur pour notre organisation qui a été préparé pendant de nombreux mois via une consultation de la quasi totalité de nos membres. C’est aussi un signal pour le monde qui nous entoure : la protection des données est un enjeu central et opérationnel dans le monde global digital en train de se construire et les autorités vont y jouer leur rôle, celui de stabilisateur éthique et démocratique de nos sociétés.
Les autorités membres de la Conférence internationale ont eu enfin la volonté de porter des messages au-delà notre communauté. Elles l’ont fait avec l’adoption de plusieurs résolutions qui répondent à de grands enjeux contemporains en matière de protection des données.
Je voudrais insister en particulier sur notre déclaration sur l’éthique et la protection des données dans le domaine de l’intelligence artificielle. Ce texte est en quelque sorte une première application d’un effort de construction d’une éthique de la donnée.
Ethique car il est, là encore, le fruit d’un processus de plusieurs mois entre autorités de différents pays qui ont confronté leurs positions et leurs vues pour construire une position commune.
Ethique car nous avons défini ensemble les grands principes directeurs pour un développement de l’intelligence artificielle qui soit respectueux des droits des personnes, au-delà du simple périmètre de la protection des données. Ces principes font écho à bien des débats entendus cette semaine. L’information obligatoire lorsque l’on interagit avec une intelligence artificielle, le droit de s’opposer à des technologies qui ont une influence sur les opinions ou le développement personnel, sont des garanties essentielles à porter si nous souhaitons conserver l’éthique qui fonde nos modes de vie et nos sociétés démocratiques.
Avec cette déclaration, la Conférence Internationale affirme sa volonté de contribuer à l’établissement d’une gouvernance mondiale de l’intelligence artificielle,
Voilà, mesdames, messieurs un panorama à grands traits de la partie fermée de la Conférence internationale. J’ajouterai que nous avons élu une nouvelle présidente (Elizabeth Denham de l’ICO) et que les autorités des Philippines, de l’Australie et du Mexique nous ont rejoints au comité exécutif. Que mes collègues me pardonnent de ne pas en dire plus, un compte-rendu plus complet sera disponible dans la matinée.
Allow me to conclude to switch to English and to briefly react to some of yesterday’s discussion and comments of our distinguished guests.
First, CEOs of major digital companies have addressed the Conference yesterday, and we must welcome the commitment made towards privacy and ethics. As former Chair of the gathering of EU authorities, I can only be pleased to hear that the GDPR has been a major step for these companies in advancing towards more privacy, even a model. Privacy is indeed a fundamental rights. And this is not a secret to tell you that we will enforce it. That’s our role, but also our duty, to pave the way towards a digital ethics. I’m sure Andrea Jelinek, our chair of the EDPB seating behind me, will agree.
Second, I believe, ethics is no longer an option, it is an obligation. As it has been said, our current data governance is not sustainable. Without ethics, without an adamant enforcement of our values and rules, our societal models are at risk. We must act because, if we fail, there won’t be any winners. Not the people, nor companies. And certainly not human rights and democracy.
Third, let’s not lose all hope! According to our programme, we will discuss at the end of this morning how to “fix things and move quickly”. I am very much looking for this and hope that the International Conference will deliver a valuable contribution to this essential objective.
Thank you and all best for the conference!!